Durabilité des vêtements : fréquence de port avant de les jeter
Sept. C’est le nombre de fois qu’un tee-shirt est enfilé, en moyenne, avant de finir à la benne, d’après une vaste enquête menée dans plusieurs pays européens. Un chiffre qui tranche avec la réalité des textiles : la plupart peuvent affronter des dizaines de lavages sans broncher. Le tableau se noircit dans certains pays, où la fréquence d’usage s’effondre à trois passages, tout particulièrement pour les vêtements issus de collections éphémères ou à bas coût.
Les conséquences environnementales de ce renouvellement express sont considérables. Les filières de recyclage, encore balbutiantes, peinent à avaler le flux grandissant de vêtements mis au rebut chaque année. Pourtant, des alternatives s’installent peu à peu, invitant à allonger la durée de vie des habits pour limiter la casse écologique.
Plan de l'article
Pourquoi nos vêtements ne durent-ils plus aussi longtemps ?
On assiste à une véritable dégringolade de la durabilité des vêtements, laminée par la montée en puissance de la fast fashion. Des enseignes telles que Zara, H&M ou Shein orchestrent une surproduction massive, encouragent la surconsommation par le renouvellement incessant des collections. Ce rythme effréné incite à acheter sans réfléchir, puis à se débarrasser de ses pièces sitôt la mode passée. Résultat : en Europe, chaque année, 4 millions de tonnes de textiles prennent la direction de la décharge, dont 80 % sont enfouis ou brûlés.
Ce modèle sacrifie la qualité des tissus. Les fibres synthétiques remplacent massivement matières nobles et résistantes. Les teintures agressives, coutures bâclées, finitions rapides tirent les prix vers le bas… mais condamnent les vêtements à une courte existence. La laine, le lin, le coton ou le cuir, longtemps gages de robustesse, cèdent du terrain face à des textiles qui ne supportent pas les lavages répétés. Pulls, jeans, tee-shirts s’abîment, se déforment, et l’usage de produits trop puissants ou de cycles de lavage inadaptés ne fait qu’accélérer le processus.
Face à l’explosion du déchet textile, la seconde main reste minoritaire : seuls 10 à 12 % des articles jetés sont récupérés pour un nouvel usage. Le reste alimente la flambée des émissions de CO2. L’industrie de la mode pèse déjà pour plus de 8 % des émissions mondiales. Certains acteurs, moteurs du slow fashion ou de la mode durable, s’engagent pour inverser la tendance. Ils misent sur la réparation, le recyclage, l’utilisation de matières certifiées, tentant de redonner du sens à la garde-robe.
Combien de fois porter un vêtement avant de le jeter : idées reçues et réalités
Les données abondent, parfois contradictoires. Une étude menée par Barnardo’s en 2015 évoque 7 à 8 utilisations en moyenne pour certains vêtements féminins avant de finir au rebut. D’autres recherches, à l’échelle internationale, évoquent un usage bien plus long : entre 120 et 170 ports pour une pièce. Autant dire que la fréquence de port avant de les jeter n’a rien d’un standard : elle fluctue selon les catégories de vêtements, les habitudes, l’âge, voire le pays.
Un autre facteur pèse lourd dans la balance : la fréquence de lavage. Plus un vêtement passe à la machine, plus il se fragilise, et plus sa durée de vie s’amenuise. L’Ademe recommande de limiter les lavages, d’opter pour de basses températures et d’utiliser une lessive adaptée. Pour donner un ordre de grandeur : un jean peut être porté 5 à 10 fois avant lavage, un pull en laine 10 à 15 fois. Les sous-vêtements, quant à eux, nécessitent un lavage après chaque port.
Type de vêtement | Nombre de ports avant lavage (recommandé) |
---|---|
Jean | 5 à 10 |
Pull en laine | 10 à 15 |
Sous-vêtement | 1 |
La durée de vie effective d’un vêtement dépend donc avant tout de l’attention qu’on lui porte : usage réfléchi, lavage mesuré, soin constant. Les réflexes qui consistent à laver trop souvent ou à considérer qu’un habit est « fini » après quelques ports alimentent le gaspillage vestimentaire. Changer de perspective, c’est déjà agir.
Des gestes simples pour prolonger la vie de sa garde-robe (et éviter le gaspillage)
Retrouver le goût de la mode durable change tout. Un habit bien choisi et entretenu traverse les années sans broncher, loin des diktats de la fast fashion. Favorisez les matières naturelles, coton, laine, lin, cuir végétal, qui se bonifient avec l’usage, gagnent parfois en caractère. À l’inverse, les fibres synthétiques ternissent vite et atterrissent plus souvent que leur tour dans la pile à jeter.
Le choix initial dicte le futur de chaque pièce. Prendre le temps de lire les étiquettes fait la différence. Voici quelques labels à repérer pour miser sur des vêtements moins polluants et plus fiables :
- bluesign
- OEKO-TEX
- Master of Linen
Des marques comme Visvim, Johanna Riplinger ou GANT Rugger privilégient teintures naturelles et méthodes respectueuses pour concevoir des vêtements durables. Au quotidien, des pratiques simples permettent aussi de préserver sa garde-robe :
- Laver à basse température et espacer les lavages.
- Faire sécher à l’air libre, bannir le sèche-linge qui fragilise les fibres.
- Réparer : un bouton recousu, une maille raccommodée offrent souvent quelques années de plus à une pièce.
- Adopter l’état d’esprit Wabi Sabi ou Boro, où la trace du temps et la réparation deviennent des atouts, non des défauts.
- Opter pour la seconde main ou le recyclage afin de donner une nouvelle vie à ce dont vous ne voulez plus.
La patine d’un cuir végétal, la douceur d’une laine de qualité ou le charme d’un vêtement rapiécé racontent une autre histoire, loin de la frénésie de la surconsommation et de la surproduction qui saturent nos décharges. Chaque geste pèse dans la balance : entretenir, choisir avec soin, réparer, c’est déjà freiner l’accumulation des déchets textiles et limiter l’empreinte écologique de l’industrie du vêtement. Un fil solide entre responsabilité et plaisir de s’habiller, à renouer, chaque matin, devant sa penderie.